En quelques années Facebook est devenu le site le plus populaire de l’internet. Impossible d’y échapper le logo est partout, tout le monde en parle et on a l’air d’un arriéré mental quand on met en doute sa pertinence. Des gens qui se sont battu toute leur vie contre les multinationales, le capitalisme sauvage ou pour un monde plus juste sont aujourd’hui les plus fanatiques adeptes de Facebook. Réussir à se faire passer pour un service public quand on est une des compagnies commerciales les plus profitables au monde c’est du vrai génie marketing.
Mode d’emploi
L’informatique offre des outils d’une puissance médiatique jamais vue auparavant. En quelques années Facebook a recouvert la planète de sa toile car le service qu’elle offrait représentait un besoin évident: communiquer facilement et simplement avec ses amis et sa famille à travers les multiples canaux et logiciels présents sur internet. En simplifiant les exigences techniques et en regroupant les internautes sur la même plateforme le succès a été immédiat. Seulement le gentil rêveur qui nous a permis de retrouver nos amis est devenu un homme d’affaires redoutable qui, après seulement quelques années en affaires, est parmi les plus riches de la planète. Comment peut-on devenir si riche juste en offrant du bonheur gratuit à l’Humanité, la question mérite qu’on se la pose ?
Le fonds de commerce
Tout le monde le sait, Facebook gagne son argent en commercialisant les données que lui fournit gratuitement la communauté de ses utilisateurs. Mais qu’est-ce que ça signifie exactement ? L’exemple le plus parlant est celui des photos que les internautes téléchargent sur le site. En téléchargent une image sur son compte on accorde tout d’abord un Copyright à Facebook qui pourra utiliser l’image comme bon lui semblera, l’image ne nous appartient plus légalement. Ensuite en attachant une étiquette à la photo pour identifier les personnes qui y figurent on enrichit la base de données de reconnaissance faciale de Facebook qui a déjà identifié plus d’un milliard d’individus. C’est pratique pour retrouver ses amis mais c’est surtout un commerce très lucratif pour Facebook. Toutes les compagnies de surveillance (sans parler des gouvernements) sont prêtes à payer cher ces informations qui permettent de rendre les caméras de surveillance plus « intelligentes ».
Il y a beaucoup d’autres données collectées à notre insu. La présence d’un bouton J’aime sur n’importe quelle page d’un site internet envoie un signal à Facebook qui suit ainsi très efficacement ses abonnés puisque presque tous les sites comportent maintenant ce bouton. On peut se dire que les abonnés sont au courant et qu’ils agissent en connaissance de cause mais c’est loin d’être évident. Et puis de plus en plus Facebook fait du zèle. Pas besoin d’être abonné pour avoir sa photo marquée et se retrouver dans la base de donnée, nos amis s’en chargent. Les boutons J’aime espionnent tout le monde, abonné ou pas, connecté à son compte ou pas, le résultat est le même.
Un marketing formidable
On peut dire que la mise en marché de Facebook a été vraiment incroyable. Le rêve de McDonald’s ! Même pas besoin de faire de la pub, les clients s’en chargent eux-mêmes. Chaque commerce ajoute le logo à son site ou à sa pub, il est partout à la télé, dans les journaux, chez ses amis, impossible d’y échapper. Théoriquement on n’a pas le droit de nommer une marque commerciale sur les ondes publiques mais cette loi ne semble pas concerner Facebook et son logo y est omniprésent. Dans mon village de Chertsey la plupart des activités informatiques sont centrées sur Facebook, impossible de participer si on n’est pas abonné.
La révolution Facebook
Même la politique a été récupérée avec les révolutions Facebook, comme si Facebook avait créé la révolution alors que ce n’est qu’un media parmi d’autres et que la révolution est faite par des révolutionnaires qui agissent concrètement. Oui Facebook les a aidé à se rassembler et à s’organiser mais l’action se serait faite de toute façon, les réseaux sociaux l’ont seulement rendu plus efficace peut-être. L’image « cool » de Facebook en a été renforcée à l’époque justement où Facebook passait d’une sympathique plateforme d’échange à un media globalitaire. Le media n’est pas l’action et les réseaux sociaux sont ambivalents, ils sont aussi utilisés par les autorités pour identifier les participants aux manifestations. Aujourd’hui beaucoup de gens s’imaginent faire la révolution en relayant des informations confortablement assis dans leur salon, il ne faut pourtant pas confondre le media avec l’action. C’est important d’être informé mais pour agir sinon on ne fait que tourner dans le vide en essayant de se donner bonne conscience. Je suis Charlie c’est bien beau mais si on ne fait rien d’autre que de l’afficher sur sa page c’est un peu facile et ça ne change pas le monde, au contraire. On se donne bonne conscience sans rien changer réellement.
Limites de Facebook
Facebook est très pratique comme babillard pour rejoindre les gens mais il y a une limite à mettre. Les facebookiens s’imaginent qu’ils sont au top de la modernité et regardent les autres comme des arriérés mais à je crois qu’ils se trompent. L’internet permet beaucoup de créativité, d’expérimentations et de découvertes et en se contentant de Facebook ils se limitent eux-mêmes, c’est facile mais futile, tout passe dans le fil du temps et on ne peut rien construire.
Je suis convaincu que c’est une mode qui va passer et que de nouvelles plateformes verront le jour tôt ou tard. Plus le media deviendra global plus les internautes inquiets se tourneront vers d’autres techniques. Alors tout miser sur Facebook c’est un très mauvais calcul. Il y a d’autres moyens de communication qui sont peut-être moins pratiques et demandent plus d’effort mais les gens communiquaient aussi avant Facebook.
Car c’est le problème avec Facebook tout est éphémère par définition, les publications se succèdent sans logique, l’insignifiant est au même plan que l’information pertinente. Alors Facebook c’est pratique mais ça n’est pas suffisant et surtout les administrations devraient être beaucoup plus prudentes dans leur utilisation d’un media commercial.
L’algorithme
Vous avez 50 amis et ils publient chacun 10 commentaires, comment Facebook va-t-il choisir quoi vous présenter, il ne peut pas tout mettre en première place.
L’algorithme va choisir pour vous selon vos interactions avec vos amis, les pages que vous avez aimé et ses propres objectifs commerciaux. Tant qu’on n’a que quelques amis ça va mais plus on en a plus le choix devient critique. Au final on ne voit que ce que Facebook a choisi bon pour nous.
Plainte à Radio-Canada
Radio-Canada est un service public d’information et il est anormal d’y voir et entendre constamment les logos et les noms de compagnies privées multinationales comme Facebook et Twitter. On pourrait tout simplement parler des réseaux sociaux sans les nommer. J’ai donc fait une plainte officielle à l’ombudsman de Radio-Canada qui est affichée sur le site de Radio-Canada.
Mais Facebook, Twitter et autres Netflix sont plus puissants que le gouvernement du Canada, c’est aux citoyens de réagir avant qu’il ne soit trop tard.